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LA PLANETE DE KAOHAOA
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20 mars 2006

Vent du Nord et ciel de corail

Il pleut sur l'île d'Hiva Oa. Le vent, sur les longs arbres verts jette des sables d'ocre mouillés. Il pleut sur un ciel de corail, comme une pluie venue du Nord qui délave les ocres rouges et les bleus-violets de Gauguin. Il pleut, les Marquises sont devenues grises. Le Zéphir est un vent du Nord, ce matin là, sur l'île qui sommeille encore.

Il a dû s'étonner Gauguin, quand ses femmes aux yeux de velours, ont pleuré des larmes de pluie, qui venaient de la mer du Nord. Il a dû s'étonner Gauguin, comme un grand danseur fatigué, avec ton regard de l'enfance.

Bonjour, monsieur Gauguin, faite moi place, je suis un voyageur lointain, j'arrive des brumes du Nord et je viens dormir au soleil, faite moi place.

Tu sais, ce n'est pas que tu sois parti qui m'importe. D'ailleurs, tu n'es jamais parti. Ce n'est pas que tu ne chantes plus qui m'importe, d'ailleurs tu chantes encore. Mais, penser qu'un jour, les vents que tu aimais te devenaient contraires. Penser, que plus jamais, tu ne navigueras, ni le ciel, ni la mer. Plus jamais, en Avril, toucher le lilas blanc, plus jamais voir le ciel au dessus du canal.

Mais qui peut dire? Moi qui te connais bien, je suis sûre qu'aujourd'hui tu caresses les seins des femmes de Gauguin, et qu'il peint Amsterdam. Vous regardez ensemble se lever le soleil au dessus des lagunes. Où galopent des chevaux blancs, et ton rire me parvient, en cascade, en torrent et traverse la mer et le ciel et les vents, et ta voix chante encore.  Il a dû s'étonner Gauguin, quand ses femmes aux yeux de velours ont pleuré des larmes de pluie qui venaient de la mer du Nord. Il a dû s'étonner Gauguin.

Souvent je pense à toi qui a longé les dunes et traversé le Nord pour aller dormir au soleil, là-bas, sous un ciel de corail. C'était ta volonté. Sois bien. Dors bien. Souvent je pense à toi.

Je signe Léonie, toi tu sais qui je suis. Dors bien.

                                                     Barbara à Brel. Octobre 1978.

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